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On n’y prêterait guère attention pour peu que l’on y passe devant un peu trop vite en voiture pour rejoindre les collines. Et pourtant cette vieille demeure niçoise, à un jet de pierre de la clinique Saint-Georges cache un véritable pan de notre patrimoine.

S’il est un restaurant qui a traversé les siècles en défendant les couleurs de Nissa la bella c’est bien « La Gaité – Nallino ». Dans ce bastion nissart à la frontière de Cimiez et de Rimiez depuis quatre générations, on cultive en famille le bon gout du Comté et son art de vivre. De l’estoficada aux raviolis à la daube, que des plats « sacramentaux » comme disait Frédéric Mistral, mijotés patiemment aux fourneaux. Mais attention, un piano peut en cacher un autre !

 André Nallino dans les cuisines de la Gaieté

 

 

L’histoire prend sa source en 1875 quand s’implante sur l’avenue de Rimiez, un bureau d’octroi permettant à la municipalité de percevoir des taxes sur les marchandises venues des collines (vin,  huile d’olive, etc.). Cette initiative a pour effet d’animer ce coin de rase campagne autour d’un débit de boissons créé par les époux Carlès, première génération de la Gaité–Nallino. Très vite pour sustenter ceux qui descendent des collines on y sert des pans-bagnats. Aux beaux jours, on y vient danser le dimanche autour d’une attraction à la mode, un piano mécanique sortie de la manufacture Nallino située à Nice est. Un piano qui va donner un nouveau souffle à la saga familiale…

En effet dés 1872, Nice est devenu le haut lieu de la musique mécanique. Pas moins de six manufactures d’instruments de ce type y prospèrent dont celle créée par Joseph Nallino.

 

Un beau jour de 1910, le fameux piano à rouleaux de la Gaieté tombe en panne. Jean Nallino, fils de Joseph, vient le réparer. Séduite par le charme de l’apprenti facteur, la jeune Thérèse Carles coince son tablier dans le mécanisme. Il n’en faut pas moins pour sceller une idylle qui les mènera à l’église puis à reprendre ensemble l’affaire jusqu’en 1966.

 

Cette année là, le flambeau est transmis à leur fils Vincent fraichement uni à Nénette. Depuis la libération les pianos automatiques font relâche. La mode est aux orchestres de bal. Ces formations live vont faire de la guinguette l’un des dancings musette les plus prisés de la ville. Des virtuoses de l’accordéon s’y produisent dont un ami proche et zélé défenseur de la nissartitude : André Truqui. Face à ce regain, Vincent et Nénette doivent pousser les murs et couvrir la terrasse. C’est durant cet âge d’or qu’André et Patricia, leurs enfants, font leurs premières armes à la Gaité « Les niçois venaient en fin de semaine pour le dancing, et le dimanche pour banqueter en famille. Tous les week-ends on montait sur le pont ! » Se souvient André. Avec les années 70 la ville se développe mordant à belles dents sur ses collines. André et Patricia voient alors des immeubles pousser sur les oliveraies et la friche où ils jouaient au ballon devenir une grande clinique moderne. Cette mutation draine de nouveaux résidants et un voisinage qui ne goutte plus les festivités sonores de la bien nommée Gaieté. Ici comme ailleurs, les pétitions mettent un terme à la frénésie des Balètis.

 

Aussi lorsqu’il reprend le lieu en 1992, avec sa sœur Patricia, André Nallino décide t-il de développer le restaurant. Respectant l’esprit de l’arrière-grand-père fondateur il dote la Gaieté de cuisines modernes et agrandît la salle avec pour ambition de perpétuer ces fondamentaux appris aux cotés de sa grand-mère et de sa maman «  Très jeune j’ai du mettre la main à la patte. À 10 ans je tournais les raviolis à la main. Avec ma sœur on passait des fourneaux à la salle…Je n’ai jamais songé à faire autre chose que ces recettes familiales qui ont régalé tant de générations. Ma mode à moi, elle n’est pas éphémère, c’est la cuisine nissarde, celles de mes ancêtres, celle que j’aime faire encore partager aujourd’hui ! » Explique André qui en 2014 fait de la résistance à Cimiez dans ce quartier résidentiel qui reste pour lui «un petit village où tout le mode se connait».

 

Chez les Nallino, on ne badine pas avec la tradition. C’est là le secret de longévité de ce restaurant de mémoire qui n’a pas fini de transmettre ses valeurs. Mais ce lieu de pèlerinage pour les anciens, restera t-il une école du terroir pour les prochaines générations ? «  Seul l’avenir nous le dira ! ». Quoiqu’il en soit, en deux siècles et d’un piano à l’autre, la Gaieté-Nallino est déjà rentrée dans l’histoire du Comté comme dans l’album de famille de ses habitants.

 

 

MusiqueMcanique

Les Nallino devant leur magasin de pianos, 36 rue Bonaparte, en 1921.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Article écrit par

Cimiez.com

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